Juger les collaborateurs sur leurs résultats, respecter la hiérarchie, privilégier le travail d’équipe, favoriser la décision par consensus, limiter les niveaux hiérarchiques, placer le client au centre, piloter à long terme, prendre en compte les traditions, investir dans l’humain, communiquer de manière franche et ouverte, prendre en compte les idées des collaborateurs, voire associer travail et plaisir, … Ces facettes du management se retrouvent à des degrés très divers selon les pays, et les cultures.
Bref tour du monde des pratiques managériales : s’en inspirer pour mieux manager
Et si l’on entend généralement que le profil du manager idéal est inspiré des pratiques anglo-saxonnes et européennes, à quoi ressemble un manager aux quatre coins du globe ? Voici un (presque) tour du monde des pratiques managériales… en un article !
Image créée avec l’intelligence artificielle
Profil type du manager, vraiment ?
On considère généralement que le profil du manager idéal est celui inspiré des pratiques anglo-saxonnes et européennes, dont on pourrait résumer les principales aspirations comme suit :
- Favoriser l’engagement des salariés par un management et un leadership participatif.
- Communiquer avec transparence pour limiter les incompréhensions, échanger les idées, aligner les individus sur les objectifs communs et connus et travailler en confiance.
- Développer les ressources : former, donner des perspectives, proposer des projets, accompagner l’acquisition de nouvelles compétences pour fidéliser les talents.
- Faire preuve d’adaptabilité et de flexibilité pour gérer le changement et l’accompagner avec ses équipes.
- Reconnaître les bonnes idées et valoriser l’innovation de ses collaborateurs pour permettre à l’entreprise de continuer à être performante dans le futur.
- Veiller à l’équilibre vie professionnel / vie privée (en montrant lui-même l’exemple, ce n’est pas qu’un simple discours), mais aussi faire preuve d’inclusion et de bienveillance.
- Avoir en tête et partager avec l’équipe son orientation client (interne comme externe) tant il est vrai que sans client au sens large… pas d’activité !
Mais qu’en est-il des pratiques dans le monde ?
Commençons par le management “à la française” et faisons mentir pour une fois notre réputation de râleurs : nous nous attacherons à montrer les points positifs les plus répandus des différents modes de management, y compris le nôtre. (Et si vous cherchez le négatif, vous pouvez le deviner en creux… On ne se refait pas…).
À noter pour ceux qui ne se retrouveraient pas dans les descriptions : comme toute tendance à globaliser, on trouvera toujours des contre exemples et c’est tant mieux. Chaque manager est unique, même s’il est fortement inspiré de sa culture et de son expérience.
Le management en France
En France, nous avons tendance à valoriser fortement le diplôme et la technique. Les managers français sont a priori bien formés et leur expertise a du poids dans la prise de décision. Contrairement à ce que laisserait supposer notre caractère dit “latin”, le management évolue plutôt dans des sociétés aux organisations structurées, avec une planification stratégique à long terme. Le respect de la hiérarchie reste dominant même si les relations interpersonnelles ont également leur importance.
La protection sociale étant conséquente comparée à de nombreux pays, il est important pour la Direction de maintenir la motivation des collaborateurs et elle tend à favoriser le travail d’équipe. La petite “touche française” et l’exception culturelle ne sont pas des vains mots : idées, créativité et innovation sont valorisés dans le travail.
“Les Français veulent savoir le pourquoi. Les Américains veulent savoir le comment.”
Le management aux Etats-Unis
À tout seigneur tout honneur, comparons le management américain.
Fixer des objectifs et juger sur la performance est la base. Pragmatique, il base son jugement sur les chiffres et les résultats. De ce fait, sa vision est davantage orientée court terme avec des prises de décision rapides qui doivent être suivies d’effets. D’autant que le caractère résolument positif de la culture US fait qu’il n’y a pas de problème, éventuellement des questions. Le “Yes, but…” n’existe pas et est remplacé par le “Amazing !”.
Le tutoiement est de rigueur et les relations professionnelles ont un prolongement à l’extérieur de l’entreprise (barbecue chez son chef, verre entre collègues etc..).
L’appartenance à une communauté en valorisant les initiatives solidaires n’empêche pas une culture de l’individualisme et la compétition (avec ses récompenses). Le client est roi, un “oui est un oui “et un “non est un non”.
Et bien que les Etats-Unis soient un pays laïque avec séparation entre l’Eglise et L’Etat, la religion n’est pas absente de la vie professionnelle. Valorisation du travail acharné, éthique et code de conduite, sensibilisation à la diversité religieuse, philanthropie, organisation de groupes de prière ou de méditations hors temps de travail sont des thématiques partagées.
Après les US, revenons en Europe. Nous n’allons pas traiter de tous les pays (sinon ce ne serait plus un article mais un essai), mais mettre l’accent sur quelques pratiques managériales spécifiques.
Le management dans les pays scandinaves
Le management dans les pays scandinaves (Suède, Norvège, Danemark, Finlande et Islande) est essentiellement basé sur l’égalité et la collaboration. Les prises de décision sont le plus souvent collectives, au sein d’une structure hiérarchique réduite.
L’inclusion (surtout entre Scandinaves), l’égalité des sexes, l’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle, la responsabilité sociale et environnementale, le bien-être et la sécurité des salariés, la transparence dans la communication et la flexisécurité au sens large (flexibilité, autonomie, éducation, protection sociale, formation initiale et continue) en font une société à la vitrine inspirante pour de nombreux pays.
Le management en Europe du Sud
Quand on parle des pays d’Europe du Sud tels que l’Espagne, l’Italie et le Portugal, les modes de management intègrent des valeurs culturelles partagées et des approches similaires dans la relation au travail et aux autres.
Est-ce dû au caractère latin ? Les relations interpersonnelles et le networking sont particulièrement développés et participent à un environnement de travail collaboratif.
Également, la solidarité et l’esprit de communauté ainsi que l’engagement sur des projets communautaires (un peu à l’instar des US) soudent et motivent les équipes. Le management ne peut occulter les traditions et la culture (célébration de fêtes locales ou religieuses) qui concourent à maintenir l’identité culturelle et la qualité des relations.
Le management en Russie
En Russie, l’histoire et la culture amènent un mode de management quelque peu différent. Les décisions sont prises de manière plus autoritaire, avec la valorisation d’un leadership à la fois fort et directif. Il s’agit de structurer les tâches et de les attribuer en amont. Comme on peut s’en douter, il y a un fort respect de la hiérarchie et de l’expertise technique.
Les décisions sont influencées par la politique de l’Etat et l‘identité nationale étant forte, on peut parler de patriotisme économique. L’histoire témoigne de la résilience des Russes qui savent faire preuve d’adaptabilité et de créativité. Enfin, pour rester dans les points majeurs, la communication est plutôt très directe quand on compare à d’autres cultures managériales.
Le management en Asie
Eloignons-nous un peu du continent européen et tournons-nous vers les cultures de management spécifiques aux pays d’Asie. Le management nippon est une référence : basé sur le consensus et la fidélité à l’entreprise, il est surtout connu pour son management Kaisen, cette pratique managériale dédiée à l’amélioration continue qui a essaimé partout dans le monde.
Outre ces méthodes largement partagées visant à atteindre l’excellence opérationnelle, le management japonais privilégie en outre la formation académique, le respect des traditions. L’humilité, le respect de l’autorité et l’harmonie sociale sont également des piliers de ce modèle.
La Chine partage un certain nombre de ces principes : respect de l’autorité, des anciens, collectivisme et culture de l’équipe, mais aussi importance des relations personnelles notamment dans le cadre de relations commerciales. La formation, le culte de la persévérance, mais aussi l’étroite relation entre les entreprises et l’Etat influent sur les modes de management. La vision long terme est en effet liée à celle de l’Etat qui intervient fréquemment dans les décisions stratégiques, la mise en place de réglementations et la planification économique.
Si l’on s’approche des pays arabes, en s’attachant à en relever les points communs, on peut citer la recherche de leaders charismatiques, évoluant dans une structure hiérarchique assez marquée où l’autorité est respectée. Le réseau personnel et les relations de famille sont importants, de même que la place donnée à la politesse, la courtoisie et au respect. Traditions et coutumes s’invitent souvent jusque dans les pratiques commerciales.
Comme dans d’autres pays, l’influence du gouvernement influe sur la politique de l’entreprise ce qui apporte une certaine stabilité et une orientation long terme. Enfin, la formation et l’éducation sont des piliers pour développer les compétences et la productivité des activités.
Le management dans les pays africains
En ayant conscience de toute la diversité géographique et culturelle que ce continent possède, les traits communs en termes de management peuvent être décrits comme suit.
Le management est plutôt participatif et communautaire, avec des décisions prises au niveau du groupe. Également, il s’appuie sur un réel respect des aînés et des traditions, avec une forte prise en compte des diversités ethniques et culturelles. Les relations interpersonnelles dans le cadre des échanges commerciaux et des négociations sont importantes. La confiance et la culture des réseaux personnels sont également clés pour le succès des entreprises.
Comme d’autres pays précédemment cités, le management se révèle adaptable et flexible, habitué à s’adapter aux changements économiques, politiques et sociaux, en faisant preuve de résilience dans la gestion des crises et en partageant les idées.
Enfin, la dimension de responsabilité sociale et l’engagement vers des projets favorisant la durabilité et l’environnement ont émergé ces dernières années et interviennent de manière croissance dans les pratiques commerciales de ces pays.
Le management en Amérique latine
Concernant les pays d’Amérique latine (Brésil, Mexique, Argentine), les pratiques managériales sont plus paternalistes, offrant une sécurité et des avantages aux salariés. Le respect de la hiérarchie est important, de même que les relations interpersonnelles. La confiance prédomine dans les affaires et la solidarité et l’engagement communautaire sont des valeurs fortes.
L’adaptation à des situations changeantes, économiques comme politiques, permettent un management résilient, à même de gérer des crises, quelles que soient les situations, en assurant la continuité de l’activité malgré les défis. Les diversités culturelles et ethniques sont de plus en plus prises en compte et valorisées.
Le management en Inde
Finissons ce tour du monde par le pays le plus peuplé : l’Inde. En matière de management, si l’influence des structures sociales traditionnelles est présente dans les relations au travail, le management indien sait faire preuve d’adaptabilité et valorise une forme de leadership transformationnel.
La hiérarchie est certes respectée, la culture de la famille est centrale, mais la diversité linguistique et culturelle, l’attention croissante portée à l’éducation, la formation et l’investissement dans la gestion des ressources humaines permettent au management indien de cultiver des programmes de développement orientés vers le long terme, y compris via l’utilisation des nouvelles technologies.
Même si la communication est perçue par certains partenaires comme un peu directe, elle a l’avantage d’être claire et les relations interpersonnelles sont clés dans des échanges commerciaux solides.
Management interculturel : quelques témoignages
Tous ceux qui ont eu une expérience à l’étranger ou ont côtoyé des salariés d’autres culture peuvent témoigner de la diversité des démarches, des idées et des façons de faire.
Partageons quelques anecdotes recueillies auprès de collaborateurs et managers français, qui montrent l’importance de la culture et les incompréhensions qui peuvent naître quand on n’y prend garde.
Catherine, 38 ans évoluant dans un management à l’américaine.
“Il y a des trucs qui m’étonnent toujours un peu. Le groupe a mis en place un programme de “wellbeing” avec des challenges entre services et pays comme “le plus grand nombre de pas dans le mois”, “la participation à un cross” ou “la meilleure recette de légumes pour une cure de désintox” et voilà que notre manager nous invite très fortement à y participer. Non seulement ça ne m’intéresse pas vraiment mais en plus il faut que je me connecte tous les jours sur la plateforme pour déclarer des actions que je ne fais pas et écrire des commentaires positifs sur celles des autres. Je n’ai déjà pas assez de temps pour faire mon boulot. Encore un truc à faire en plus, soi-disant pour notre bien-être.”
Harry, 48 ans, basé aux US et manager d’une équipe multiculturelle.
“Les Français sont tout le temps en vacances. Impossible de faire des réunions avec toute l’équipe. Entre mai et septembre, il y en a toujours un qui manque. Et ils ne proposent pas de se connecter pendant leurs congés. Je ne comprends pas.”
Hervé, 40 ans, chargé de projets en Afrique.
“Rien ne se passe jamais comme prévu. Les aléas sont quotidiens, même si on a tout préparé avant de partir. Après, il ne faut pas s’énerver. Avec l’équipe locale, on trouve toujours une solution, même si c’est parfois ce que j’appellerais de la bidouille. Mais, bon, à la fin ça fonctionne.”
Karim, 29 ans, membre d’une équipe projet globale.
“Je n’y comprends rien. Ils sont tous à dire “Great, marvelous, good job, nice idea” et aucun ne pose les questions qui fâchent. On est partis sur les chapeaux de roue et il n’y a que nous, français, pour alerter sur ce qui cloche. Les risques ont été mal évalués et les délais sont irréalistes. Mais quand je dis ça, on me dit que je n’ai pas un esprit de teamworker.”
Franck, 55 ans, manager détaché en Chine pour 2 ans.
“Quand je parle à l’équipe, ils me disent toujours “oui” et rien ne se passe. Quand je leur demande s’ils ont compris, ils disent également oui mais j’ai des doutes. Est-ce pour garder la face ? S’ils ont des problèmes ils ne m’en parlent pas et rien n’avance ! J’ai l’impression qu’on ne se comprend pas du tout.”
Ces exemples pourraient se multiplier à l’infini. Et c’est en connaissant les cultures et les pratiques managériales dont elles sont issues que l’on peut mieux comprendre, s’adapter et relativiser.
En conclusion
L’on voit bien que les pratiques managériales diffèrent partout dans le monde. Selon où l’on se trouve sur le globe ou avec qui l’on travaille, nous pouvons être amenés à travailler avec un manager qui sera plus ou moins direct, plus ou moins consensuel, plus ou moins attaché aux règles, plus ou moins accessible, plus ou moins ouvert d’esprit sur certains thèmes…
Bien qu’ayant tendance à se globaliser, les pratiques restent en effet fortement teintées de culture et qu’il n’est pas toujours simple d’évoluer en tant que hiérarchique ou collaborateur dans une entreprise ou un pays étranger a fortiori quand on n’a pas les codes.
Pour autant, tout s’apprend et avec de la curiosité, de l’empathie et du respect, il est possible d’éviter les erreurs les plus manifestes… le temps d’adapter ses pratiques à la situation.
Beaucoup de choses restent à dire si l’on étend le sujet au management cette fois–ci d’équipes internationales à travers la thématique du management interculturel. Faut-il s’adapter à chaque culture ? Imposer la sienne ? Imaginer un dénominateur commun accepté par tous ?
Peut-être lors d’un prochain article de blog…
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