La reconnaissance au travail : voici un sujet d’importance sur lequel vous trouverez pléthore de lectures, d’études, de conseils, tant il est un sujet universel… et un des carburants de notre vie professionnelle.
Reconnaissance au travail : quelles postures pour motiver ?
Une définition serait : acte par lequel la contribution de chaque individu à son poste est pointée, nommée, valorisée par un remerciement, un encouragement, une forme de félicitation…
On en a tous besoin, et ce, quelle que soit notre place dans l’entreprise, dans l’équipe, collaborateurs comme managers. Son impact est fondamental sur notre motivation, notre engagement, et même sur notre santé !
Mais avant d’aborder des concepts théoriques essentiels, puis des pistes de bonnes pratiques à adopter pour donner ou recevoir des signes de reconnaissances, laissez-nous vous raconter le cas de Lila.
Si Lila est un personnage de fiction, chacune des anecdotes notées ci-dessous provient des témoignages remontés par les stagiaires de nos formations. Nous vous les proposons, ici sous forme de récit, afin d’enclencher une réflexion, un débat.
Le cas Lila : une reconnaissance de son travail qui tarde à arriver…
Lila est chef de projet technique au sein d’une petite équipe en organisation hybride : une partie des collaborateurs est délocalisée, Lila est souvent seule au siège. Elle s’entend bien avec son manager, lui-même nomade (il n’est pas présent au quotidien). L’organisation qu’il a mise en place permet à chaque employé de réaliser correctement le travail : performance, atteinte des objectifs… L’engagement de chacun se mesure aux efforts fournis sans faillir, même dans les « périodes de rush ».
Lila se dit que ce cadre de travail pourrait être idéal, pourtant quelque chose ne va pas. C’est que parfois, elle apprécierait un peu plus de gratitude, de reconnaissance. Plongeons-nous ensemble dans une semaine type de Lila. Qu’observez-vous ?
Lundi
Lila arrive dans l’open-space, en rejoignant sa place sur un ilot de 10 collègues, elle lance un « bonjour à tous ». Un seul lui répond en souriant et levant les yeux par-dessus son écran. Un peu refroidie mais compatissante, elle se dit que chacun est pris dans sa tâche, « c’est normal qu’ils ne répondent pas ».
Dans l’allée centrale, elle voit passer Jeff, sympa mais « speed », le manager qui la voit. Elle lui fait signe et au même moment, il prend son téléphone et tourne les talons. Lila se dit « sûrement un appel urgent, c’est bête j’avais une simple question, je vais encore galérer à avoir sa réponse ». Elle ne verra plus Jeff de la journée, il ne répondra pas à son mail aujourd’hui.
Mardi
Lila reçoit l’appel d’une collègue délocalisée « C’est urgent : j’ai absolument besoin du dernier audit de performances techniques pour ce client… Oui pour demain matin, sans ça on perd sa confiance, imagine l’impact sur la gestion du portefeuille ! ».
Lila, consciente de l’enjeu, mais aussi du stress sur ses épaules, accepte. Elle bouscule son agenda, prolonge sa journée, envoie « just on time » le document, et signe son mail par « j’en ai fait une priorité absolue, peux-tu me confirmer s’il te plait que c’est bien Ok pour toi ? » … Pas de réponse. Dans le doute, elle appelle 10 min après, tombe sur la boite vocale. « Elle est peut-être en train de parler au client, elle me rappellera surement après ».
Mercredi
À la première heure, elle relance sa collègue par mail « es-tu Ok avec le document que je t’ai envoyé ? ». Réponse automatique immédiate « je suis absente jusqu’à vendredi inclus »… Lila se dit « c’est vraiment pas sympa, je me suis pliée en 4 pour même pas un merci… ou un simple OK, bien reçu ! ».
15h : Lila relit sa préparation pour son prochain entretien annuel. « Comment puis-je les pousser à m’accorder une augmentation, ou du moins, une prime ? ». En effet, depuis 3 ans, malgré son investissement, ses efforts, l’atteinte des objectifs fixés par son manager, et toute son expérience, elle en a assez de s’entend dire que « l’enveloppe a été attribuée à une autre équipe », et qu’il faut être patient « tu es en place depuis à peine 3 ans, certains n’ont pas été augmenté alors qu’ils sont là depuis plus longtemps ».
Jeudi
Lila participe à la visio de debrief d’équipe de l’action événementielle déployée la semaine dernière. Au débotté, elle y a remplacé un collègue absent pour accueillir le public sur le stand, valoriser les pratiques de la société, rester jusqu’à la fermeture… quitte à mettre sa vie personnelle de côté.
La visio se déroule tel un compte rendu factuel : pas un mot pour les employés présents. « Je ne comprends pas : on me fait confiance pour assurer, et pas un mot de gratitude… C’est vraiment décevant ».
Vendredi
Lila arrive avant 8h : elle a prévenu son manager qu’elle doit partir à 16h30 ça a été validé depuis longtemps. 13h à la cafétéria, son manager, plateau à la main l’alpague : « Lila, on vient de décrocher un appel d’offres, j’ai besoin de tout le monde en réunion à 17h, tu préviens les autres pendant que je valide l’administratif ? » … « Tu pars à 16h30 ? Impossible que tu sois absente, on a tous besoin de tes bonnes idées. Partir à 16h30 en même temps… Tu peux sûrement te connecter en visio de là où tu seras ? Sinon, tu peux décaler ton départ, non ? ».
Reconnaissance inexistante : mythe ou réalité ?
Le cas Lila vous fait sourire, avouez-le 😊. Soit parce que vous trouvez les situations exagérées « ça ne se passe pas comme ça en entreprise, les gens mettent plus de formes ». Soit parce que vous trouvez que certaines situations ressemblent à la vraie de l’entreprise…. « Ça me rappelle quelque chose… ».
Dans les deux cas, ce récit aura eu un effet sur vous : c’est la vocation de ce témoignage. Nous assistons à un essoufflement, une baisse de motivation de Lila, une altération de son engagement.
Avez-vous remarqué ? Les signes de reconnaissance, de gratitude sont inexistants dans sa semaine. Chacun, pris dans l’exigence de son propre quotidien en oublie des pratiques simples telles que :
- saluer (et encore mieux, saluer avec le prénom/nom de la personne dont on reconnait qu’elle existe à nos yeux),
- remercier pour un service rendu (un bref appel, un mail, un mot sur messagerie, un sms…),
- valoriser une action « normale » quand elle est bien faite (même si c’est un attendu du poste) et a fortiori une action inattendue – quelqu’un qui remonte ses manches pour aider là où on ne l’entendait pas… accorder un temps d’entretien individuel pour faire un feedback positif, laisser la personne s’exprimer sur ce qu’elle a appris d’elle-même profiter d’une réunion pour souligner ce qui a été fait, féliciter publiquement…
- tenir un engagement et une parole donnés sans y revenir au premier empêchement, car « se plier en 4 » pour maintenir sa promesse est une forme de reconnaissance remarquable, et nourrissent le sentiment de confiance que l’on place en vous.
Voilà ce qui a probablement manqué Lila, et à répétition, cela fait des dégâts.
Dresser une liste de « bonnes pratiques » serait ambitieux, tant il existe de possibilités de montrer de la reconnaissance dans la vie professionnelle… et personnelle ! C’est ce que nous rappellent de nombreuses théories.
4 dimensions principales de la reconnaissance au travail
Comprendre les rouages subtils de la reconnaissance exigerait une lecture chronophage et croisée de différentes ressources, toutes disciplines confondues (sociologie, sciences humaines, philosophie…) D’ailleurs, à ce titre, nous vous proposons de découvrir ces 2 articles courts et faciles d’accès :
- La reconnaissance, un outil puissant, par Émilie Lemire Auclair, fondatrice des Points d’équilibre, consultante en santé mentale et travailleuse sociale.
- Le pouvoir de la reconnaissance au travail par Jean-Pierre Brun, Professeur émérite de management/Expert-conseil et co-fondateur d’Empreinte Humaine
En synthèse, nous aimons retenir le principe des 4 dimensions principales de la reconnaissance, par le professeur Brun (et souvent repris, décliné dans d’autres écrits).
Reconnaître la personne ou « reconnaissance existentielle »
On s’intéresse aux personnes en tant qu’êtres singuliers. Les individus ont le sentiment d’exister et d’être appréciés pour leur valeur en tant qu’êtres humains et non en tant qu’employés.
Reconnaître les résultats : l ’approche comportementale
On s’intéresse aux résultats effectifs, observables, mesurables générés par l’employé. On reconnait la valeur de sa contribution au travail.
Reconnaître l’effort : l’approche bienveillante subjective
Dans certains contextes concurrentiels, à flux tendus ou d’organisation malmenées par un manque de moyens, les efforts fournis ne sont pas toujours proportionnels aux résultats constatés. Et c’est parfois très ingrat quand le résultat est moyen ! Reconnaître chez l’employé, ses difficultés, ses peines, son investissement valorise l’individu, nourrit sa confiance en l’entreprise.
Reconnaître les compétences, la pratique
On reconnait chez l’individu ses qualités professionnelles, ses compétences pratiques. On s’intéresse au souci qu’il porte à autrui, etc. La qualité de la relation est mise en avant.
À chaque forme de reconnaissance, il est possible de rattacher une bonne pratique pour l’exprimer, une façon de montrer que l’on est attentif, conscient de ce qui se joue face à nous. Et l’infinité des actions possibles justifierait un autre article 😊 !
Néanmoins, l’ANACT propose sur son blog une approche qui nous paraît intéressante avant même de vouloir identifier ce que serait une juste marque de reconnaissance : un auto-questionnement simple.
Montrer de la reconnaissance, de la gratitude, c’est d’abord s’interroger :
- Pour quoi ? Performance ? Santé ? Fidélisation ? Engagement ? Climat social ?
- De quoi ? Résultat ? Performance ? Effort ? Compétence ? Comportement ? Ancienneté ? Expérience ?
- Par qui ? Hiérarchie ? Pairs ? Client ? Société ? RH ?
- Comment ? Rémunération ? Formation ? Promotion ? Responsabilisation ? Encouragement ? Soutien ?
Vous le percevez : les réponses à ces questions conduisent à adopter des postures d’ouverture et d’empathie. Comme par exemple :
- porter un regard attentif à ce que à quoi on n’accorde moins d’importance tant le quotidien nous absorbe (les rituels de politesse que l’on peut bâcler par exemple)
- ressentir le besoin de l’autre : l’envie de montrer ce qu’il a fait dont il est fier, son envie de parler d’une réalisation, etc
- choisir les mots, les gestes, les actions précisément ciblées sur la personne, parce que personnaliser donne un poids encore plus fort à la marque de reconnaissance choisie
- renforcer la qualité des liens entre les individus : l’expression sincère, même minime, d’une forme de reconnaissance nourrit chez chacun une part de bien-être, presque de joie à se sentir exister aux yeux d’autrui, à appartenir à une communauté.
Le Gymnase propose une réflexion, des vidéos d’observation, des cas concrets et des tips dans son article : 4 réflexes pour motiver ses salariés. Vous vous en doutez : la reconnaissance est l’un de ces 4 réflexes !
La reconnaissance : vous pouvez aussi la demander !
Et si nous revenions au début ? Vous êtes Lila. Petit à petit, vous vous sentez devenir comme transparente face au peu de considération portée à votre égard et à l’envers de vos actions. Il est possible (et recommandé !) d’agir, en deux temps.
D’abord, un temps de réflexion, pour identifier ce qui vous pèse, vous manque. Le questionnement proposé ci-dessus reste valable (pour quoi ? de quoi ? par qui ? comment ?) ! Vous aimeriez recevoir plus de reconnaissance…
Puis dans un deuxième temps, quand vos réponses sont claires, vous pouvez aller exprimer auprès de la personne/ des personnes ce besoin. Exercice délicat a priori, car il s’agit d’exprimer, sans colère ni agressivité, ce qui nous manque et surtout, ce que l’on aimerait concrètement voir changer. Nous vous invitons pour cela à (re)lire l’article du Gymnase du Management Qu’est-ce que l’assertivité. Il propose une approche de la Communication Non Violente pour s’exprimer avec clarté et assurance quand nos émotions pourraient nous faire perdre le contrôle. Découvrez-y les exemples, une vidéo, et nos recommandations !
Pour aller plus loin
▸ Le Gymnase du Management a en catalogue des modules e-learning pour les entreprises qui souhaitent outiller leurs managers sur les situations du quotidien (animer et motiver les équipes, conduire les entretiens, donner du feedback, …) et les situations sensibles (re-motiver un salarié, gérer un conflit entre deux employés, …).
▸ Tous ces fondamentaux du management sont abordés dans la formation « Les 100 premiers jours de la prise de poste », de manière condensée pour donner toutes les clés et outils aux primo-managers.
▸ Découvrez également nos formations soft skills.