L’entretien de départ : un rendez-vous clé à ne pas manquer !

Quelques pratiques essentielles et des exemples de questions à poser pour réussir l’entretien de départ de son collaborateur.

L’entretien de départ : un rendez-vous clé à ne pas manquer !

Comme nous l’avons vu lors de notre récent article sur l’offboarding, la gestion des départs des salariés – et notamment des démissions – peut transformer cette période difficile pour l’entreprise et les collaborateurs en une opportunité pour le futur… à condition d’en appliquer les bonnes pratiques.

Or, seulement la moitié des salariés qui ont vu un de leurs collègues partir, estiment que l’entreprise réagit bien durant cette période d’instabilité interne (étude Heyteam, “La gestion des départs par les entreprises”).

Il y a pourtant de nombreux bénéfices pour une entreprise à réussir ses départs : cultiver son image, mais aussi préserver son climat social, assurer le transfert des connaissances, identifier ses champs d’amélioration, voire permettre un futur éventuel retour d’un collaborateur…

Réaliser l’entretien de sortie est une étape clé, tant pour les collaborateurs qui partent, que pour les managers, les ressources humaines…

Pour autant, selon une étude Qualtrics, seulement un tiers des employés quittant une organisation ont un entretien de sortie.

Il est donc important de l’organiser et de le conduire selon certains principes. Pour cela, voici quelques pratiques essentielles, suivies des thèmes que l’on peut aborder à travers des propositions de questions à poser.

Manager en entretien de sortie suite à la démission d'un de ses collaborateurs

Les pratiques à adopter par l’entreprise

Planifier l’entretien

Inutile de l’organiser à chaud, à l’annonce de la démission. Il convient plutôt de programmer l’entretien quelques jours plus tard, pour faire un bilan de l’expérience du collaborateur au sein de l’entreprise. Si l’entretien de départ n’est pas obligatoire, il faudrait le proposer systématiquement lors d’une démission, mais aussi d’une fin de contrat, de stage ou d’alternance. Bien réalisé, il peut en effet apporter des éléments clés et désamorcer certains ressentis négatifs. Proposer un entretien physique est préférable, mais si ce n’est pas possible, l’échange peut être réalisé à distance. Ce qui compte, c’est de le conduire avec respect et considération.

Choisir l’interlocuteur

Selon le contexte, le manager ou les ressources humaines pourront conduire l’entretien. L’avantage, s’il est réalisé par les ressources humaines, est que l’échange peut être mené avec plus de neutralité et moins de ressentiment, notamment si les relations entre celui qui part et son entourage professionnel sont un peu conflictuelles. De plus, les RH peuvent consolider les feedbacks de collaborateurs de différents horizons et proposer des plans d’action si une problématique ressort plus particulièrement.

Mais bien sûr, l’entretien peut aussi être conduit par le manager direct, dès lors qu’il adopte une posture d’exploration, d’écoute, de non-jugement. Le seul objectif : comprendre.

Préciser les règles de l’échange et s’y tenir

Pour qu’il soit bénéfique aux deux interlocuteurs, il est important d’instaurer un climat de confiance qui permettra de recueillir des informations précieuses sur l’expérience positive ou négative de celui qui part. Ainsi, la confidentialité de tout ou partie de l’entretien doit être proposée et respectée. Il est plus facile, à quelqu’un sur le départ, de taire ce qui ne lui a pas plu que de l’exprimer. Mais s’il est rassuré sur la façon dont son témoignage sera rapporté et conscient que son ressenti compte, peut améliorer les choses pour le futur, l’entretien de départ apportera beaucoup d’informations utiles.

Avoir la bonne attitude

Conduire un entretien, et a fortiori un entretien de départ, mobilise la plupart des techniques d’entretien individuel classiques avec ses questions ouvertes, fermées, semi ouvertes etc. En termes d’attitude, l’empathie – c’est-à-dire la capacité à comprendre les émotions de quelqu’un d’autre – est clé pour décoder le bilan de l’expérience du collaborateur, les raisons de son départ et son état d’esprit.

Le ressenti est important, le factuel l’est également. Pour que le témoignage puisse déboucher, le cas échéant, sur des améliorations concrètes, il ne faut pas hésiter, lors de la discussion, à rechercher des éléments factuels une fois le premier ressenti exprimé.

Il est également important de remercier le collaborateur pour ce qu’il a apporté. Remercier, c’est montrer sa considération en mettant en avant les points positifs de la collaboration et en laissant, pourquoi pas, la porte ouverte.

Thèmes et exemples de questions lors de l’entretien de départ

Voici les 4 thèmes principaux à aborder lors de l’entretien et des exemples de questions à poser au collaborateur (liste non exhaustive). Pour rappel, ces questions permettront aux entreprises de récolter des informations précieuses pour comprendre la situation et l’améliorer si besoin. Elles permettent aussi de témoigner de l’attention aux employés !

Raisons du départ

Qu’est-ce qui vous a poussé·e à rechercher une autre opportunité ?
Pourquoi avez-vous décidé de quitter l’entreprise ? Qu’est-ce qui vous a décidé à accepter ce nouveau poste ?
Qu’est-ce qui vous aurait poussé·e à rester dans l’entreprise ?

Management

Comment s’est passé votre intégration (si elle est récente) ? Que pensez-vous de la façon dont vous avez été managé·e ? Avez-vous le sentiment que vos réalisations ont été reconnues ?
Pensez-vous avoir eu les ressources nécessaires (en matière de support, de formation, d’outils …) pour tenir votre poste ?
Avez-vous partagé certaines de vos préoccupations à une personne de l’entreprise avant de décider de partir ?

Bilan de l’expérience

Quels sont les points que vous avez le plus appréciés ? Quels sont ceux qui vous ont manqué/ déplu ?
Si vous pouviez changer quelque chose à propos de votre travail ou de l’entreprise, de quoi s’agirait-il ?
Avez-vous des suggestions pour nous aider à nous améliorer ?

Futur

Recommanderiez-vous l’entreprise à une connaissance ? Pourquoi ?
Envisageriez-vous de revenir travailler ici dans le futur ? Dans quel domaine ou pour quel type de poste ? À quelles conditions ?
Acceptez-vous de garder le contact ?

Témoignages : entretien de départ et décision d’amélioration

Voici des verbatim recueillis par les entreprises lors d’entretiens de départ de 3 salariés et les actions qui, après recoupement avec d’autres témoignages, ont été mises en place.

Cas 1 : quitter son premier emploi au bout de 2 mois

Tout d’abord, voici le retour de Thibault, jeune ingénieur de 24 ans et nouvel embauché qui a pris la décision de quitter l’équipe de développement qu’il avait rejointe il y a 2 mois pour son premier emploi :

Ludovic [manager de Thibault] m’a rapidement expliqué l’un des projets puis m’a demandé de faire équipe avec Elodie, une collègue qui allait me former. Mais elle n’avait pas de temps à m’accorder. Même si la culture d’entreprise était sympa, le manque d’informations, la difficulté d’accéder à certaines données et matériels (je n’ai eu mes codes d’accès qu’au bout de 2 semaines de présence), l’absence de conseils et le manque d’organisation global m’ont décidé à donner ma démission. J’ai un autre poste en vue. »

Les leçons :

Le retour d’expérience de ce nouvel embauché a été recoupé avec celui d’autres salariés nouvellement recrutés. Même si les conditions d’accueil de Thibault étaient la résultante d’un concours de circonstances inopiné et malheureux, l’entreprise a travaillé sur l’amélioration du process d’embauche et d’accueil. Aujourd’hui, un parcours d’entretiens avec les différents interlocuteurs clés est systématiquement organisé et suivi. Chaque nouvel employé se voit attribuer un parrain qui le guide sur son nouveau lieu de travail. Et la demande d’accès des codes informatiques est menée en amont, avant l’embauche, pour permettre un accès au plus tard le lendemain de l’arrivée.

Cas 2 : démissionner suite à une charge de travail trop importante

Autre témoignage, celui d’Asma, 38 ans, qui a donné sa démission à contrecœur, après 8 ans passés en tant que gestionnaire grands comptes.

« Ce n’était plus une vie. Certes, j’avais un salaire confortable, j’aimais mon travail, la culture d’entreprise était stimulante et les membres de mon équipe étaient supers. Mais à titre personnel, je ne m’y retrouvais plus. Après le licenciement soudain de Quentin, un de mes collègues les plus proches, je me suis retrouvée à tenir son poste en même temps que le mien, après avoir récupéré la plupart de ses clients et prospects. Ce devait être une organisation temporaire, le temps de procéder à une embauche. Mais cela a duré plus de 10 mois et compte tenu de ma charge de travail, je n’avais plus une minute à moi. J’ai tenté d’alerter et ai sollicité une entrevue avec mon manager. Mais rien ne s’est passé malgré les assurances qu’il m’a données. J’ai commencé peu à peu à regarder les offres, j’ai eu quelques entretiens et puis voilà. Je me suis dit que c’était le moment de tenter une nouvelle expérience ailleurs, toujours en tant que gestionnaire grands comptes, mais dans une organisation qui préserve davantage mon équilibre personnel. »

Les leçons :

Suite à l’entrevue d’Asma avec son manager et les ressources humaines avant son départ, l’entreprise a réellement pris conscience que la situation n’avait pas été évaluée à sa juste mesure. S’ils n’ont pas pu la faire changer d’avis, ils ont pu bénéficier de ses conseils et recommandations d’amélioration lors d’une discussion franche et ouverte. Ils ont compris l’importance qu’il y avait à communiquer avec l’équipe en place après l’annonce du licenciement d’un salarié et l’importance d’avoir un suivi plus formalisé sur la répartition des tâches et l’avancée du recrutement. Asma gardera le contact avec l’entreprise et n’a pas exclu l’idée de revenir un jour si une opportunité intéressante se présentait…

Cas 3 : partir à cause d’une mésentente avec son manager

Dernier exemple, celui de Jean-Pierre, 43 ans, intervenant de maintenance, dans l’entreprise depuis 12 ans.

« Ce n’était plus possible. Depuis que l’on avait ce nouveau chef, tout avait changé. L’organisation avait changé, l’équipe aussi, la liste de ce qu’on avait à faire aussi et on n’avait pas d’informations sur le pourquoi. Je devais rentrer plein de nouvelles données sur l’ordinateur, ça me prenait au moins 45 minutes par jour. Je n’avais pas signé pour ça. J’avais demandé une entrevue au chef mais n’ai pas eu d’entretien. De toute manière, il était tout le temps en réunion. Pourtant j’en avais des idées et des suggestions. Des améliorations possibles, on en voit tous les jours sur le terrain. Mais personne ne nous écoute. Des postes en maintenance, on a le choix, avec même un meilleur salaire. Je n’y croyais plus, j’ai préféré partir, même si c’est dur, après autant d’années. »

Les leçons :

Jean-Pierre montre par son retour que même s’il est critique sur son nouveau manager, il était toujours engagé et attaché à son travail. Manifestement, les changements, même nécessaires, n’ont pas été assez accompagnés de communication et d’explications sur les bénéfices attendus. Le nouveau manager ne consacre pas assez de temps au terrain et à échanger avec ses équipes. Suite à l’entrevue, l’entreprise a réuni les managers pour travailler sur le mode de communication des changements au sein des équipes. Comment leur donner du sens ? Comment faire adhérer les collaborateurs ? Les accompagner ? Une formation management est programmée en fin d’année pour renforcer les compétences de leadership et de communication.

On le voit, chaque entretien de départ est unique et peut fournir des informations précieuses, surtout en ces temps de fort turnover et de pénuries de candidats dans certains secteurs. Or, bien qu’il soit important et potentiellement très bénéfique, il n’est pas toujours réalisé.

Systématiser l’entretien de sortie, selon certains principes de qualité, est donc un axe de progrès pour nombre d’entreprises soucieuses de la satisfaction et de la fidélisation de leurs salariés.

Pour aller plus loin

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